Dans le quotidien de Fatiha Ouali, la Grand-Plage a remplacé les stades. A un détail près. « Sur les rayonnages de la médiathèque, on trouve un livre où je suis photographiée, s’amuse Fatiha. Ça force le respect de certains jeunes usagers ! » Qui pourrait imaginer que derrière la silhouette d’un agent de la médiathèque se cache une des plus grandes championnes de marche athlétique française ? A la grande époque de la quadruple recordwoman de France, la marche n’était pas très médiatisée. Depuis, Yohann Diniz a rendu la discipline plus populaire… D’ailleurs, Fatiha n’était pas vraiment destinée à l’athlétisme. Issue d’une famille de 12 enfants, elle commence par pratiquer la gymnastique comme ses frères et sœurs. Au collège Jean-Baptiste Lebas, la Gazelle de la marche découvre le cross. De course en entraînement, elle s’essaye au 3000 m marche au club d’athlétisme de Roubaix. Six mois après un premier « super chrono », elle se qualifie pour les championnats de France. L’endurance est là. La maîtrise aussi. « Je n’ai jamais été disqualifiée, parce que je possède une bonne technique ». Fatiha reste dans le rythme et multiplie les compétitions et stages nationaux. Elle portera le survêtement tricolore de 17 à 31 ans avec fierté.
A 43 ans, Fatiha n’a pas dit son dernier mot. Même si son club de cœur est à Roubaix, elle court aujourd’hui pour le SCO Marseille Sainte-Marguerite. « Je participe encore aux interclubs en 1ère division mais c’est de plus en plus difficile avec l’âge. Ma course leur rapporte entre 700 et 800 points !  lance-t-elle avec malice ». De ces années de haut niveau, la marcheuse retiendra une complicité sans faille avec son entraîneur Thierry Nuttin et de nombreuses amitiés avec des grands noms du sport. La frêle marcheuse photographiée derrière le colosse Porte-drapeau David Douillet lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques de Sydney a des souvenirs pleins la tête et les jambes. Sous contrat avec Adidas, elle pose même dans le catalogue La Redoute en 2004 !

Franchir le pas

A l’époque des Galfione ou Pérec, la marche athlétique n’était pas sous les feux des projecteurs. La marcheuse de l’ombre a dû se reconvertir à la fin de sa carrière. Entrée en mairie en 1996, elle a bénéficié d’un détachement comme beaucoup de sportifs de haut niveau fonctionnaires. Solitaire dans son sport, Fatiha a opté pour un métier au contact avec les gens. Comme beaucoup, elle aurait pu devenir éducateur sportif pour transmettre. A la médiathèque, c’est le goût de la lecture qu’elle transmet avec des jeux autour du livre ou des contes pour enfants. Le lundi, lorsque la médiathèque est fermée, Fatiha change de casquette. Agent à 10% pour le service des sports, la championne diplômée du premier degré de marche nordique, emmène des femmes de 40 à 70 ans faire du sport. « Certaines sont en manque d’exercice physique, d’autres, en pleine forme, ont juste envie de découvrir un sport en mode doux, précise Fathia ». Adaptée aussi aux personnes qui souffrent de diabète, de problèmes cardiaques ou de surpoids, la marche nordique fait dépenser 30% d’énergie en plus grâce au travail des bras. Un bénéfice pour fortifier les os, dit-on. Idéal pour lutter contre l’ostéoporose. « Une bonne paire de basket suffit, précise la coach. Pas besoin d’une tenue de sport particulière. Seule la motivation et le Sport Pass sont requis ! Je fournis même les paires de bâtons, gracieusement offertes par Newfeel (Décathlon). La marche nordique est une activité saine, simple et accessible. Nous la pratiquons en petit groupe. Le long du canal, on bavarde en marchant de 4 à 10 km ! »

Aujourd’hui, ce ne sont plus les médailles et les records qui font marcher Fatiha. Pas après pas, elle réconcilie avec le sport, tous ceux et surtout toutes celles qui ne trouvent pas leur place dans un club ou dans une salle. En marchant tout simplement.

Bio expresse

• 2000 JO de Sydney
• 2001 Record de France du 5 et 10 km marche
• 2002 Record de France du 3 km marche
• 2003 Record de France du 20 km marche
• 2006 Fin de sa carrière internationale