Georges Cufay, chantre du patois
Publié le 27 novembre 2018|
Président de l'association des Patoisants Roubaisiens, Georges Cufay fait du patois un prétexte à l'amusement et à la rencontre. A 83 ans, ce gai luron ne manque pas une occasion de réunir ses troupes pour partager sa passion.
L’œil rieur, une feuille à la main, Georges Cufay s’installe et nous tend le texte qu’il chantonnera avec les Patoisants Roubaisiens pour fêter les 25 ans de l’association. « V’la vingt chinq ans qu’in est sur scène. Vingt chinq ans qu’in s’bat pou l’patois ». Présent depuis les origines, Georges préside l’association depuis une dizaine d’années. C’est non sans émotion qu’il revient sur ces deux décennies : 25 ans de représentations théâtrales avec sa troupe aux quatre coins de Roubaix et de la région, de soirées dansantes hautes en couleurs, de repas où chacun y va de son histoire drôle… en patois évidemment. Car le patois, pour ce passionné, est avant tout une histoire de partage.
La mémoire des anciens
« Nos parents et grands-parents qui parlaient le patois n’aimaient pas la guerre, ils étaient amicaux, bienveillants, les portes de leurs maisons étaient toujours ouvertes. C’est cet état d’esprit que nous voulons transmettre à travers nos événements et rendez-vous » explique-t-il. Si la passion du patois lui est venue assez jeune, elle ne s’est vraiment révélée qu’à l’âge adulte. « J’aimais beaucoup les réunions de famille avec mes cousins, les grandes tablées où l’on parlait fort, mais je dois dire que mes parents n’étaient pas franchement emballés à l’idée que nous parlions le patois à la maison. A l’époque, il fallait plutôt gommer notre accent et maîtriser parfaitement le français pour trouver une bonne situation ».
Une passion sans limite
« Je m’y suis sérieusement intéressé plus tard lorsque j’ai rencontré la mère de mes enfants. Nous avons vécu un temps chez son grand-père qui ne parlait que le patois. Elle devait me traduire la moitié de nos discussions ! Alors, j’ai commencé à fouiller dans les livres et je ne me suis jamais arrêté ». Le jour du mariage de son fils, nouveau déclic. Le fils de son employeur, qui l’honore de sa présence, prend la parole et fait rire l’assemblée aux éclats avec l’histoire « Si ch’ptit Jésus y avo pinsé ». « Un fils de patron, vous vous rendez compte ! » s’amuse-t-il encore. Georges retrouve le fameux texte quelques années plus tard, et lorsque Manou, la première présidente des Patoisants Roubaisiens, lance un appel pour fonder l’association, il la raconte à son tour. La boucle est bouclée.
« Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le patois n'est absolument pas vulgaire, bien au contraire, il est plein de sensibilité’ »
La beauté des textes
Pour cet amoureux de la littérature, le patois est aussi une formidable occasion d’appréhender les auteurs autrement et de redécouvrir la beauté de certains textes. Des textes patoisants mais pas uniquement. S’il aime écrire ses propres proses, il adore faire redécouvrir les grands écrivains francophones. « Je traduis les textes de Victor Hugo, de Verlaine. Le portrait d’un oiseau de Jacques Prévert en patois, c’est juste sublime » s’émeut-il. « Ce parler local a le pouvoir de faire rire mais il peut aussi transmettre beaucoup d’émotions. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il n’est absolument pas vulgaire, bien au contraire, il est plein de sensibilité ».
Transmission
Si l’association réserve de beaux événements en fin d’année, dont une soirée de l’Amitié le 14 décembre*, Georges espère sensibiliser davantage les jeunes générations. « Nous avons déjà fait des rencontres avec des slameurs et entrepris des rencontres, mais le patois reste méconnu voire énigmatique pour beaucoup. C’est pourtant une langue pleine de symboles qui se caractérise avant tout par sa diversité ».
*patoisants-roubaisiens-web-com.asso-web.com/evenement-42-soiree-de-lamitie.html
BIO EXPRESS
- 1935 : Naissance à Lille
- 1953 : Service militaire. Il est marin électricien à Toulon, on l’appelle le « Ch’ti »
- 1958 : Rencontre avec son épouse. Epoque où il se passionne pour le patois
- 1980 (années) : Mariage de son fils. Un grand moment où il prend conscience du pouvoir rassembleur du patois
- 1993 : Fondation de l’association des Patoisants Roubaisiens et de sa troupe
Les coups de cœur de Georges Cufay
Le parc Barbieux et le canal de Roubaix : A 83 ans, il faut que je marche ! Quels plus beaux endroits pour flâner ?
La place des Martyrs et de la Résistance : elle me rappelle mes jeunes années lorsque que je faisais les marchés aux bestiaux. C’est une place chargée d’histoire hautement symbolique.
Mac Arthur Glen : Non pas que j’aime faire les boutiques ! Mais j’ai été marqué par l’implantation de cette grande artère commerçante. Roubaix est une ville qui bouge.